L’Ecosse est une terre de whisky car elle dispose d’eau en abondance tout le long de l’année, apportée par les rivières et ses affluents, d’un climat tempéré et d’une terre fertile très propice à la culture de l’orge et de la tourbe. C’est sous forme de pluie et de neige que l’eau fait sa première apparition. Si elle tombe sur des roches cristallines, l’eau s’écoulera rapidement et n’entrera pas en contact avec les couches souterraines. Peu chargée en éléments minéraux, elle conserve alors sa douceur ainsi qu’une légère acidité. Cette qualité d’eau est la plus répandue en Ecosse. En contact avec un sol plus perméable ou une roche sédimentaire (calcaire, grès), l’eau pénètre le sous-sol et se charge en minéraux, carbonates et sulfates. Elle devient alors alcaline et dure. La célèbre distillerie Glenmorangie, située dans le nord des Highlands, est l’une des seules à disposer d’une telle source d’eau. Pour de nombreux distillateurs, une eau douce qui s’écoule sur du granit à travers de la tourbe constitue la meilleure eau de production. Sur la petite centaine de distilleries encore en activité, moins de vingt possèdent une source d’eau présentant de telles propriétés, notamment Balblair, située à moins de quatre kilomètres de Glenmorangie.
Il faut beaucoup d’eau pour élaborer du whisky (6 à 8 litres au moins pour un litre d’eau-de-vie sortant de l’alambic, sans compter celle utilisée pour réduire le degré d’alcool) ; son influence réelle sur le résultat final est beaucoup plus controversée. Certes, il vaut mieux utiliser de l’eau pure, c’est-à-dire exempte au maximum d’impuretés minérales ou organiques, mais on sait aujourd’hui parfaitement filtrer une eau polluée pour un coût minimum. Quant à la “douceur” de l’eau écossaise tant vantée, elle tient plus de la légende que d’une vraie réalité : des distilleries réputées comme Glenmorangie, Glenkinchie ou Highland Park se félicitent d’utiliser des eaux “dures”, c’est-à-dire chargées en sels minéraux, essentiels à leurs yeux pour le style de leurs malts. Par ailleurs, quand on connaît l’eau jaunâtre voire marron, car fortement imprégnée de tourbe, utilisée par Bowmore ou Lagavulin, on se dit que le degré de pureté de l’eau de source n’empêchera pas la production de grand whisky. La différence de goût prononcée entre les whiskies provenant des diverses distilleries est due en partie à la qualité de l’eau utilisée. L’eau des Highlands se charge souvent de tourbe, ce qui lui donne une couleur brunâtre. Les substances dérivées de la tourbe sont acheminées par l’eau, et contribuent bien souvent à l’originalité du goût des divers whiskies écossais.
Mais l’eau n’est certainement pas le seul facteur déterminant du goût d’un whisky de malt. Le procédé de fabrication joue bien entendu un très grand rôle dans le goût d’un whisky. La même eau de source est utilisée pendant tout le processus de fabrication du Scotch Whisky. D’abord elle est utilisée pour le maltage de l’orge, puis dans la phase de brassage où elle est mélangée au malt broyé (grist) pour obtenir le moût (wort). L’eau sert également à refroidir les vapeurs d’alcool dans l’alambic et enfin elle est utilisée pour réduire le degré d’alcool « avant la mise en fût ou lors de la mise en bouteille ».
Concrètement chaque distillerie est rattachée à une source d’eau naturelle. Ils vont la sélectionner en fonction de trois paramètres, d’abord qu’elle soit accessible, la moins dure si possible et que le goût de l’eau puisse apporter une typicité, un goût spécifique au whisky qu’il projette de fabriquer. Le goût du whisky final doit représenter l’image de marque de la distillerie et le goût de l’eau contribuera à ce dernier.
Voici quelques exemples :
Talisker utilise une eau douce et tourbée ne provenant pas de ruisseaux ou de rivières mais des 21 sources souterraines du Hawk Hill à quelques pas de la distillerie.
Auchentoshan puise son eau d’une source sur les hauteurs des collines de Kilpatrick.
Balblair puise son eau dans l’Allt Dearg.
Voici de l’eau naturellement tourbée sur l’île de Islay.