Le Japon forme, depuis 1945, un archipel de 6852 îles de plus de 100 km2, dont les quatre plus grandes sont Honshu, Hokkaido, Shikoku et Kyushu, représentant à elles seules 95 % de la superficie terrestre du pays. L’archipel s’étend sur plus de trois mille kilomètres. La plupart des îles sont montagneuses, parfois volcaniques ; par exemple, le plus haut sommet du Japon, le mont Fuji (3 776 m), est un volcan inactif depuis 1707. Le Japon est le dixième pays le plus peuplé du monde, avec environ 127 millions d’habitants pour 377 488 km2. C’est aussi le quatrième pays producteur de whisky au monde. La production de whisky japonais a commencé autour de 1870, mais la première production commerciale a eu lieu en 1923 lorsque la première distillerie du pays, Yamazaki, a été créée. Plusieurs distilleries produisent du whisky au Japon. Les plus connues appartiennent aux groupes Suntory et Nikka. Elles produisent et commercialisent des Single Malts et des Blends. Les japonais découvrent officiellement le whisky en juillet 1853 lorsque la flotte du commodore américain Matthew Perry débarque dans la baie de Tokyo pour offrir à l’Empereur divers cadeaux diplomatiques, quatre volumes d’oiseaux d’Amérique, des révolvers, des machines agricoles, un télescope et du Bourbon Whiskey. Un fût est réservé à l’Empereur du Japon, tandis que les autres destinés à ses conseillers servent à faire découvrir le whisky à la population japonaise. Dès la fin du 19ème siècle, des sociétés nippones tentent de fabriquer du whisky à base de riz ou de maïs mais leurs essais ne sont pas concluants. La personne essentielle dans l’histoire du whisky japonais est Masataka Taketsuru.
Ce japonais de naissance part étudier l’art de la distillation du whisky en Écosse où il entre comme étudiant à l’Université de Glasgow en 1918 et effectue ses stages dans les distilleries de Longmorn, de Bo’ness et d’Hazelburn. Deux ans plus tard, après s’être marié avec une écossaise et avoir été formé, il rentre au Japon avec tout son savoir et avec le projet d’ouvrir des distilleries. Il collabore tout d’abord avec Shinjiro Torii pour créer la toute première distillerie de whisky japonais à Yamazaki en 1924. Puis il crée en 1934, sa propre société, « Dainipponkaju », qui prendra plus tard le nom de Nikka. Il installe sa distillerie à Yoichi sur l’île de Hokkaido. Après la fin de la seconde guerre mondiale et de l’occupation du Japon, la bière et le whisky remplacent le saké comme alcools populaires dans les zones urbaines. Avec la période de forte croissance vers les années 1964-1965, la production de whisky de grain démarre, autorisant l’élaboration de Blended Whiskies. Alors Nikka fondent sa deuxième distillerie à Miyagikyo en 1969 et Suntory à Hakushu en 1973. La production augmente jusqu’en 1983 avec un pic cette année-là de 379 000 kilolitres de whisky produits. Elle diminue ensuite de 1983 jusqu’en 2008, subissant la concurrence des whiskies étrangers due à une baisse importante des tarifs douaniers et l’arrivée de nouvelles boissons. Nikka et Suntory profitent de cette concurrence pour repenser leur production, et leurs améliorations seront récompensées dans les années 2000 par plusieurs prix et médailles. Le marché japonais retrouve le chemin de la croissance depuis 2009 jusqu’à aujourd’hui.
Les différences entre whiskies japonais et whiskies écossais ?
Malgré des débuts difficiles, le Japon est aujourd’hui une terre propice à la production de whisky. Par exemple, la distillerie Yamazaki est construite au croisement de trois rivières, fournissant l’humidité parfaite pour la maturation du fameux breuvage. Ce genre de conditions, présentes dans de nombreuses zones du Japon, explique comment ils ont pu égaler la qualité des whiskies écossais.
A la différence des distilleries écossaises, les japonaises doivent, pour produire leurs Blends, être « autosuffisantes ». Aucun transfert de stock de whisky ne s’effectue entre les groupes Nikka et Suntory. Ainsi, les Blends du groupe Nikka et Suntory, sont essentiellement élaborés à partir de whiskies de malt et de whiskies de grain distillés et vieillis par les distilleries appartenant aux groupes respectifs. Si un petit nombre de Blends et de Vatted Malts produits au Japon s’inspirent indéniablement du modèle écossais, les Single Malts japonais possèdent en revanche un style à part entière. Ainsi, les distilleries nippones les plus réputées élaborent des Single Malts à fort caractère qui rivalisent les plus grands whiskies écossais. Le climat tempéré, la pureté de l’eau, la présence de tourbières (notamment sur l’île d’Hokkaido), sans oublier la compétence des distillateurs japonais, sont autant d’atouts essentiels qui expliquent la qualité des Single Malts japonais. La distillerie Yoichi, sur l’île d’Hokkaido dispose justement d’une source d’eau souterraine filtrée à travers de la tourbe offrant la meilleure eau qui soit pour produire du whisky. Elle possède aussi son propre « kiln » (four) surmonté de cheminées en forme de pagode. Si ce four venait à ne plus fonctionner, la distillerie continuerait à s’approvisionner en orge maltée tourbée et non tourbée pour subvenir à leur besoin.
Ses alambics de type « pot still » sont chauffés à feu nu avec de la poudre de charbon, méthode traditionnelle que la plupart des distilleries écossaises ont progressivement abandonnée. En forme d’oignon et relativement trapus, ces alambics produisent un alcool riche et corpulent. Yoichi se trouve à seulement 1 km de la mer. Cette situation géographique explique un caractère complexe, des notes salées et légèrement médicinales. En outre, elle possède sa propre tonnellerie, apportant un soin tout particulier à la sélection des fûts, pour la plupart des « hogsheads » de premier remplissage, confectionnés sur place à partir de fûts de Bourbon, une pratique de moins en moins courante en Ecosse.
Le fait que les japonais incorporent dans certains de leurs whiskies un pourcentage de Single Malts écossais n’est plus un secret. Cette pratique, qui ne concerne que les whiskies d’assemblage (Blends et Vatted Malts), est d’autant plus avérée que Nikka possède une distillerie de malt écossaise : Ben Nevis. Elle est également courante chez son rival Suntory, propriétaire des distilleries : Auchentoshan, Bowmore et Glen Garioch. Car ces deux géants produisent un grand nombre de Blends destinés principalement au marché asiatique. Bien moins sec que ses équivalents écossais, les whiskies japonais se révèlent surprenant d’équilibre et de douceur car la qualité produite est tout autant liée à la puissance du Single Malt d’Islay (Ecosse) qu’à l’excellence de celui produit à Yoichi. Si les Single Malts se distinguent par le soin apporté à la sélection, les Blends japonais ne sont pas en reste. Fidèles à la tradition du Blended Scotch Whisky que les Ecossais eux-mêmes ont tendance à délaisser, ils contiennent un pourcentage élevé de Single Malts. D’autre part, le whisky de grain est toujours élaboré à partir de maïs. En Ecosse, le maïs a été progressivement remplacé par le blé. Même s’ils sont attachés à la tradition, les producteurs de whisky japonais n’hésitent pas à innover. Par exemple le « Nikka from the Barrel » est un Blend puissant (51,4% vol.) affiné dans des fûts de Bourbon de premier remplissage, élaboré à partir des deux Single Malts Miyagikyo et Yoichi ainsi que d’un whisky de grain.
On peut donc dire que les whiskies japonais ont une forte personnalité et regorgent de notes fruitées et vanillées. Vacillant entre tradition et modernité, l’industrie du whisky est le reflet de la société japonaise.